Deux méthodes pour intégrer les RPS dans le Document Unique (DUER)

Intégrer les RPS dans le DUERP

Une obligation légale pour l'employeur

L’employeur a pour obligation d’évaluer les risques, et de retranscrire cette évaluation dans le Document Unique d'Évaluation des Risques Professionnels (DUERP). La prévention des risques psychosociaux (RPS) , comme pour tous les risques professionnels, doit être intégrée dans le DUER.

Un exercice difficile pour les acteurs de la prévention

Cette intégration est bien souvent un casse-tête pour les préventeurs, Ingénieur Hygiène Sécurité Environnement (HSE) ayant la charge de la rédaction et la mise à jour du DUERP. C’est de mon point de vue largement compréhensible, car les RPS même s’il faut les considérer comme de véritables risques, ne sont pas des risques tout à fait comme les autres : les sujets relèvent de l’humain, des relations entre les personnes, de ressentis qui peuvent parfois être très personnels et donc non partagés. Il est ainsi difficile pour un responsable HSE par exemple, de s’emparer de sujets qui vont au-delà de connaissances techniques sur la santé et la sécurité.

Afin d’aider les préventeurs, responsable HSE, représentant au CHSCT, etc. l’ANACT et l’INRS proposent deux méthodes très opérationnelles et validées du point de vue méthodologique.

Je propose dans cet article d’en faire une brève synthèse, les références bibliographiques complètes pouvant ensuite être consultées pour plus d’informations.

La méthode ANACT pour prendre en compte les RPS dans le DUERP

Notion de situation problème

Cette méthode s’appuie sur l’analyse de situations problèmes en groupe de travail : une situation problème est une situation précise de travail qui engendre du stress/des tensions/un mal-être conduisant à un débordement, une impasse, ou un conflit.

Par exemple, une chargée d’accueil qui régulièrement doit apporter les colis à l’autre bout de l’entreprise, sans aide à la manutention et au port de charge, abandonnant ainsi son poste d’accueil pendant plusieurs minutes. (exemple donné dans [2])

Définir les Situations Problèmes par Unité de Travail en groupe de travail

L’Anact propose que le groupe de travail réunissant Représentants des Personnels (IRP), managers, collaborateurs, réunis par le chef d'entreprise, identifie une ou deux situations problèmes par unité de travail, puis ensuite procède à l’analyse de celle-ci. Des grilles d’analyse sont proposées dans [1]et [2]. En résumé, il s’agit sur une situation comme celle-ci :

- dans un premier temps de décrire précisément ce qui se passe

Tel jour, la chargée d’accueil réceptionne un colis, appelle l’atelier qui ne répond pas, puis se déplace jusqu’à l’atelier pour y déposer le colis. Son diable est resté à l’atelier elle doit donc porter le colis sur tout le trajet, et l’ascenseur est en panne ce qui l’oblige à prendre l’escalier.

- dans un second temps, de décrire les conséquences sur 3 dimensions : santé et vécu individuel, collectif de travail, performance / entreprise

Effets santé : mal de dos - effet sur le vécu au travail : agacement – sur le collectif de travail : risque de tensions entre accueil et atelier – effets sur la performance : pas de réponse aux appels pendant l’absence

- dans un 3e temps, d’identifier les causes à l’origine de la situation problème

Procédure de réception des colis - Réception des appels à l’atelier – Disponibilité des outils d’aide à la manutention – Signalement des pannes d’ascenseur

- une fois les causes identifiées, il devient aisé de proposer des pistes d’actions.

[1]et [2] proposent également une grille pour évaluer la gravité, et ainsi réaliser la cotation.

La méthode INRS

Les facteurs de risque du "Rapport Gollac"

Cette méthode est aussi à appliquer en groupe de travail.

La grille d’analyse repose sur les 6 facteurs de risque issus du rapport Gollac [3] : intensité et temps de travail, exigences émotionnelles, autonomie, rapports sociaux, conflits de valeurs, insécurité de la situation de travail.

Evaluer et caractériser les facteurs de risque

Il s’agit avec cette méthode :

-          De parcourir l’ensemble des facteurs de risque ;

-          Pour chaque facteur de risque d’explorer différents sous-thèmes ;

Par exemple, pour le facteur intensité et complexité du travail : contraintes de rythmes de travail, niveau de précision des objectifs de travail, adéquation des objectifs avec les moyens et responsabilités …

-          Pour chaque sous thème, d’indiquer sur une échelle de 1 à 4 le niveau d’intensité;

-          Pour chaque sous-thème, dans une colonne « commentaire » d’indiquer les situations concrètes de travail qui sont les plus caractéristiques de la question posée.

Retour d'expérience de préventeurs en charge du DUER

J’ai animé une formation avec des préventeurs qui ont donné leur point de vue sur les deux méthodes.

Méthode ANACT

Les avantages :

  • La méthode, très structurée en plusieurs étapes, permet de ne pas aller trop vite aux conclusions. Elle ressemble à la méthode de l’arbre des causes.
  • L’analyse d’une situation problème permet de couvrir tous les risques, pas uniquement les Risques Psychosociaux  ; cela permet de ne pas stigmatiser les RPS.
  • L’analyse permet de traiter de problèmes organisationnels et matériels.

Les inconvénients :

  • Il faut identifier des situations problèmes, ce qui n’est pas forcément évident d’une part, d’autre part cela limite l’action sur un mode préventif.

Méthode INRS

Les avantages :

  • Balaye un ensemble de thématiques auxquelles le préventeur et le groupe de travail n’auraient pas forcément pensé ;
  • Permet de couvrir l’ensemble des facteurs de risques professionnels ;
  • Permet d’être dans la prévention des risques ;
  • Bon outil pour ne traiter que les RPS.

Les inconvénients :

  • Ne traite que du RPS, cela peut être une limite.

Mon point de vue 

J’ai une préférence « culturelle » pour la méthode Anact, mais je pense que la mise en œuvre de la méthode INRS est plus aisée. Une collègue me suggérait qu’il pouvait être mis en œuvre en premier lieu la méthode INRS, puis pour analyser les situations qui ne font que l’objet de commentaires avec cette méthode, d’utiliser ensuite la méthode ANACT ; cela semble effectivement le plus complet, mais assez exigeant du point de vue des moyens à y consacrer !

[1] https://www.anact.fr/prendre-en-compte-les-rps-dans-le-document-unique-du-kit-pratique-gratuit-lusage-des-acteurs

[2] https://www.anact.fr/jeu-rps

[3] Mesurer les facteurs psychosociaux de risque au travail pour les maîtriser Rapport du Collège d’expertise sur le suivi des risques psychosociaux au travail, faisant suite à la demande du Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé.

Méthode INRS : http://www.inrs.fr/demarche/evaluation-risques-professionnels/ce-qu-il-faut-retenir.html

Questions-réponses sur le DUERP : http://www.inrs.fr/media.html?refINRS=ED%20887

 

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