La charge de travail, cet iceberg
La charge de travail est un sujet majeur dans notre société caractérisée par l’intensification du travail et l’hyperconnexion. Pour l’ergonomie, elle correspond au coût d’une activité. C’est-à-dire, à la « quantité de ressources mobilisées par une personne dans la mise en œuvre d’une tâche » [1].
Bien souvent, la charge de travail se trouve réduite à une dimension quantitative (par exemple un nombre de taches dans la journée, des débordements …). Or, elle n’en est que la partie visible. La charge de travail se révèle bien plus complexe en réalité. Appréhender celle-ci passe par la prise en compte des différents aspects qu’elle peut revêtir. Elle peut être à la fois physique, mentale, cognitive, émotionnelle, sociale et/ou organisationnelle.
Lorsque l’on souhaite évaluer la charge de travail dans sa globalité, il est nécessaire de prendre en compte son aspect tridimensionnel [2] :
- La charge prescrite : qu’est-ce que l’on me demande de faire ?
- La charge réelle : qu’est-ce que je fais réellement ?
- La charge ressentie : comment je ressens ma charge, qu’est-ce que j’en pense ?
La charge de travail n’est pas un problème en soi, elle existe normalement dans toute activité de travail. Ce qui peut s’avérer délicat, c’est le maintien d’un bon équilibre. Lorsque la charge de travail est bien équilibrée, elle est dite optimale et tout se passe bien. En revanche, lorsque la balance se trouve déséquilibrée, cela peut devenir problématique :
- La surcharge de travail : l’exigence de la tâche est trop élevée par rapport à mes ressources,
- La sous-charge de travail : la situation fait que je ne sollicite pas suffisamment mes ressources. Plus tabou que la surcharge de travail (dans une société qui valorise le sur engagement au travail), ses effets peuvent s’avérer tout aussi néfastes.
Managers et collaborateurs : pourquoi évaluer la charge de travail ?
Evaluer la charge de travail est un enjeu majeur tant pour l’entreprise que pour le salarié. C’est également un enjeu important de prévention. Pour rappel, l’employeur est tenu légalement d’assurer la santé et la sécurité de ses salariés.
Tout d’abord, évaluer sa charge de travail permet de vérifier si celle-ci est bien adaptée, et, de se donner toutes les chances de rétablir le bon équilibre entre ses ressources et les exigences de la tâche.
Evaluer sa charge de travail peut aussi permettre au salarié d’estimer son temps de travail, le temps passé par catégorie d’activité, le nombre de tâches qu’il effectue en une journée, une semaine, une année et ainsi de valoriser le travail qu’il effectue réellement.
Objectiver la charge de travail peut permettre, non seulement, au salarié d’apprécier la correspondance ou non avec sa charge ressentie mais également, d’amener les personnes à réfléchir, individuellement ou même en groupe de travail, à comment eux-mêmes peuvent agir sur leur propre charge de travail, comment ils peuvent la réguler.
Cela peut indiquer également à l’employeur si le temps de travail « prescrit » de son salarié correspond bien à son temps de travail « réel » et envisager une embauche si besoin est… ou à l’inverse un élargissement du périmètre du salarié.
Evaluer sa charge de travail peut conduire tout simplement à discuter du travail, ce qui ne peut être que bénéfique.
Quels en seront les effets ?
Agir sur la charge de travail a des répercussions positives :
- Améliorer la santé et la qualité des relations au travail en rétablissant, par exemple, l’équité et en diminuant le stress.
- Faciliter l’attractivité de certain poste et rétablir le sens du travail.
Comment l’évaluer ?
Lorsque l’on souhaite évaluer la charge de travail, il est donc important de la penser dans sa globalité et de bien prendre en compte toutes ses dimensions. Pour ce faire, il est intéressant de combiner plusieurs méthodes.
- Appréhender la charge prescrite passe par la recherche d’informations sur ce que l’organisation demande aux salariés de faire : consulter les fiches de poste, regarder le temps de travail, le rythme etc.
- Concernant la charge réelle, les travailleurs peuvent relever en temps réel les activités effectuées ainsi que leur durée, à l’aide d’une grille de budget-temps (cf.image) ou tableau. Cela peut se faire sur deux ou trois demi-journées ou journées entières.
- L’évaluation de la charge subjective peut passer par des entretiens ou questionnaires (veiller à bien penser les questions en amont ! Qu’est-ce que je veux évaluer ?).
- L’évaluation de la charge de travail ne peut se faire sans croiser tous ces « résultats » lors d’ateliers collectifs par exemple et/ou d’entretiens individuels.
Cet article a été écrit par Julie Salisse, étudiante en ergonomie à l'Université Toulouse Jean Jaurés.
BIBLIO
[1] ChargesTravail_Tricot.pdf (pagesperso-orange.fr)
[2] https://www.anact.fr/4-choses-savoir-sur-la-charge-de-travail
Leduc, S. (2019). Charge de travail. Dans : Gérard Valléry éd., Psychologie du Travail et des Organisations : 110 notions clés (pp. 83-88). Paris: Dunod.